M NICOLAS MOMPACH
Témoignage de Nicolas MOMPACH sportif de Haut niveau 2022-2023
Entretien réalisé le 10 janvier 2023 au centre Pierre Mendès France Bureau UEFAPS Bâtiment A au 8ème étage
Durée 09:36-10:19
Nicolas Fortuné : Nous sommes le 10 janvier 2023 il est 9h36 et nous nous trouvons au centre Pierre Mendes France dans le 13ème arrondissement au bureau de l’UEFAPS Bâtiment A au 8ème étage.
NICOLAS FORTUNÉ : Bonjour Nicolas pourriez-vous vous présenter ?
NICOLAS MOMPACH : Je m’appelle Nicolas MOMPACH. Je suis né le 2 juillet 2001. J’entre dans ma 22ème année. Je pratique le tir sportif depuis 2011. En septembre 2023 cela fera 12 ans que je fais du tir sportif.
NICOLAS FORTUNÉ : Pourriez-vous m’expliquer ce qu’est le tir sportif ?
Qu'est-ce que le tir sportif ?
NICOLAS MOMPACH : Dans le tir sportif il y a le tir à la carabine, le tir au pistolet, le tir à l’arbalète et le tir au fusil. Je tire uniquement à la carabine, sur différentes distances, 10, 50 et 300 mètres.
Entre autres, il existe, le tir au plateau qui comprend la fosse olympique, où les cibles sont libérées vers l’avant du tireur, depuis une fosse et le skeet où les cibles sont envoyées depuis le sol, mais à différentes hauteurs, de droite à gauche.
Mes spécialités sont le 10 et le 50 mètres. Pour le 10 mètres, on a droit à 60 coups en position debout. J’utilise une carabine à plomb air comprimé sans optique. C'est à dire qu’on n’a pas de lunette grossissante. On voit la cible comme on la voit à l’œil nu. Mais nous disposons d’un système de visée de dioptrie. C’est comme un petit cercle, un guide à travers lequel on aligne la carabine, au centre de la cible. Plus la Carabine est alignée, plus les chances d’atteindre la cible sera grande. Il faut donc être stable et concentré. Notre esprit doit se vider, comme on pourrait le faire dans le cadre d’une séance de méditation. Le but recherché est de parvenir à se concentrer exclusivement sur la cible. La manipulation d’armes à feu pousse de nombreuses personnes à confondre l’entrainement militaire avec le tir sportif. Ce dernier n’a rien à voir avec l’armée, hormis le fait que ses origines remontent aux compétitions organisées entre différents régiments.
NICOLAS FORTUNÉ : Est-ce qu'on pourrait vous comparer à un tireur d'élite ?
NICOLAS MOMPACH : Nous sommes des tireurs de précision. Je ne connais pas énormément de sport qui exige autant de précision que le tir à la carabine. A 10 mètres, le but est de toucher une cible avec un plomb qui fait 4,5 millimètres. Sur une cible Il y a 10 zones. La dixième zone correspond au centre. A 10 mètres, la zone N° 10, mesure 0,5 millimètres. La marge de manœuvre est donc de 5 millimètres en comptant la taille de la zone 10 et le plomb. Plus le plomb se rapproche de l’extrême centre, plus il rapporte des points, soit un total maximum de 10,9 points.
Comment vous est venue la passion pour le tir sportif ?
NICOLAS FORTUNÉ : Et vous êtes champion !
NICOLAS MOMPACH : On dira que je ne suis pas mauvais !
NICOLAS FORTUNÉ : Comment vous est venue cette passion pour le tir sportif ? Il y a-t-il des chasseurs ou des sportifs de haut niveau dans votre famille ?
NICOLAS MOMPACH : Non !
- Ma mère a participé à des compétitions d’athlétisme quand elle était au collège.
- Mon père a devancé son appel sous les drapeaux pour voir si une carrière militaire pouvait l’intéresser. Mais je pense qu’à mon âge il était déjà sapeur-pompier.
- Mes sœurs n’ont jamais eu d’appétence pour le sport.
Personne ne pratiquait le tir dans mon entourage. En fait, rien ne me prédestinait à faire du tir à la carabine. Des amis m'ont portant suivi, mais ont très vite arrêté, parce que cela ne correspondait pas à l’idée qu’ils s’en faisaient. J'ai commencé à m’intéresser au tir sportif, un peu par hasard. Je me souviens qu’en 6ème, pendant un cours d’éducation physique, des tracts présentant tous les sports de ma ville, ont été distribués. Je n’étais pas sportif du tout. Je n’avais jamais pratiqué un sport. A l'âge de 10-11 ans j’ai étudié la musique au conservatoire. Le tract indiquait qu’il y avait du tir sportif. Dans ma tête, je l’associais au tir de loisir pratiqué dans les fêtes foraines. Je trouvais cela amusant, mais j’étais intrigué. Je me suis rendu au club de tir sportif de Douai, un mercredi après-midi. C’est donc là où j’ai fait la rencontre de mon premier entraîneur. Il a été le premier à croire en moi. Il est malheureusement décédé. Il s’appelait Jean-Pierre Marteel. J’avais énormément de respect pour cet homme. Il m'a accompagné du mieux qu'il pouvait. Ce n’était pas le meilleur des entraîneurs mais il croyait en moi et cela a fait toute la différence. Je me souviens qu'un jour, à une compétition, je n’avais pas forcément très bien performé. Il m'avait dit, au coin d'une table « je suis certain qu'un jour, tu seras champion de France ». Bien qu’il n’ait jamais eu à entrainer un champion de France, l'année suivante j’ai été vice-champion de France. Il a été visionnaire. Je n’ai pas de mot pour exprimer toute ma sympathie et ma reconnaissance pour le temps et l’énergie qu’il m’a consacrés.
Du tir sportif de haut niveau à l'AES !
NICOLAS FORTUNÉ : Mais comment êtes-vous arrivé en AES ?
NICOLAS MOMPACH : Je n’ai pas fait toute ma scolarité à l’Institut Administration Economique et Sociale de l’Ecole de droit de la Sorbonne.
J'ai vécu à Strasbourg pendant 3 ans. Originaire de la région du Haut de France, j’ai fait ma terminale au Lycée Louis Pasteur à Strasbourg. J’ai débuté mon parcours universitaire en intégrant la Licence en Administration Economique et Sociale (AES) parcours Comptabilité Finance, à l’université de Strasbourg. Le problème est que je n’étais pas bon en comptabilité, pas bon du tout. J’ai pourtant validé mes trois premiers semestres de ma licence. 2020-2021, l’année traumatisante du confinement à cause du covid 19, a contraint tous les étudiants à suivre leurs cours à distance. Là, j’ai décroché complètement ! Loin de ma famille, en colocation, les distractions ont finalement eu raison de moi et de mes études. A l’exception du droit social, plus rien ne m’intéressait.
Il a pourtant fallu que je réagisse et très vite. Il faut savoir que j’étais arrivé au terme de ma formation Junior, sport-études. Je devais prendre une décision. Soit, poursuivre ma formation de sportif, soit l’arrêter là, à cette période charnière de ma vie de jeune sportif. J’ai finalement choisi de continuer en intégrant l’INSEP, l'institut National du Sport de l'Expertise et de la Performance situé à Vincennes. Toutes les équipes de France, regroupant quasiment tous les sports olympiques, s’y trouvent. Après y avoir été accepté, arrivé en région parisienne, il me fallait cette fois, trouver une université ayant signé une convention de coopération académique avec l’INSEP.
NICOLAS FORTUNÉ : Et c’est comme cela que vous êtes arrivé à l’IAES !
NICOLAS MOMPACH : En fait quand L’INSEP m’a proposé de poser ma candidature pour intégrer l’Université Panthéon Sorbonne, mon sang n'a fait qu'un tour. Les opportunités pour intégrer une université aussi prestigieuse, ne se représenteraient sans doute pas d’aussi tôt.
Je pensais à tort que toutes les formations en AES prédestinaient au métier d’expertise comptable. En arrivant à Paris 1 j’ai compris qu’il n’en était rien. Le parcours Ressources Humaines de la licence AES était exactement ce que je recherchai. J'ai donc postulé en espérant être pris. Pour être honnête, je me trouvais à ce moment-là, dans une situation très délicate. La notification d’acceptation délivrée par l’INSEP était arrivée tardivement, trop tardivement. J’ai complétement raté les dates butoirs de campagne de dépôt de candidature pour poursuivre ma licence AES dans une université parisienne. Obtenir une inscription à l’Institut Administration Economique et Sociale de l’Ecole de Droit de la Sorbonne allait donc devenir déterminant pour éviter l’année blanche qui se profilait devant moi.
NICOLAS FORTUNÉ : Mais quand avez-vous déposé votre candidature à l’IAES ?
NICOLAS MOMPACH : Un ou 2 mois avant la rentrée universitaire 2021-2022. Je me souviens qu'on m'avait dit « c'est mort de chez mort ». Je ne sais plus comment j'ai obtenu les coordonnées de Vanessa Ertus, gestionnaire de scolarité à l’UFAPS en charge des sportifs de haut niveau à Paris 1. Je lui ai expliqué ma situation. Je venais d’être accepté à l’INSEP. Soit, je trouvais une inscription à Paris, soit je retournais dans le Nord. Vanessa m'a dit que c'est « MORT ».
NICOLAS FORTUNÉ : Que s’est-il passé alors ?
NICOLAS MOMPACH : Vanessa m'a appelé un jour pour m’annoncer qu’il était sans doute possible de formuler un recours gracieux auprès de la présidence. Cet appel est arrivé en plein milieu d’une période de compétition intense. Il s’agissait de la sélection au championnat d’Europe.
Compte tenu des enjeux, je n’avais pas d’autres choix que de faire face à la situation en trouvant le temps de rédiger une solide lettre de motivation. J'ai finalement été accepté et cela m’a été extrêmement bénéfique. Par rapport à Strasbourg, mes résultats sont montés en flèche tout simplement parce que les matières étudiées à l’IAES m’intéressaient.
NICOLAS FORTUNÉ : Quelle a été votre marge de progression entre Strasbourg et Paris ?
NICOLAS MOMPACH : A Strasbourg je frôlais la moyenne, maintenant je me positionne autour de 13. Il est vrai que j’ai beaucoup moins de temps pour étudier. Mais compte tenu de tous les efforts consentis pour me faire accepter à l’Université Paris 1, je me donne l’obligation de réussir et de tout faire pour ne pas jeter l’opprobre sur ceux qui ont accepté de me donner une ultime chance.
Après mes études en AES
NICOLAS FORTUNÉ : Je suppose qu’un sportif de haut niveau ne le reste pas toute sa vie, pourriez-vous nous parler de votre projet professionnel ?
NICOLAS MOMPACH : Certains font le choix de suivre les formations proposées à l’INSEP. Il est question ici de formations en partenariat avec des universités, des écoles et autres instituts de formation, dans le but de travailler dans les métiers du sport ou du commerce. D’autres font le choix de faire tout autre chose.
NICOLAS FORTUNÉ : Pour devenir professeur d’éducation physique ?
NICOLAS MOMPACH : Oui mais pas que cela. Je souhaite me positionner sur des fonctions administratives. Quand le sport sera terminé, je ne veux pas être entraîneur ou en tout cas je ne veux pas en faire ma carrière.
NICOLAS FORTUNÉ : Vous souhaitez vous diriger vers quel type d’emploi alors ?
NICOLAS MOMPACH : Avant d'arriver à IAES de Paris 1 je voulais suivre les traces de mon père en devenant sapeur-pompier professionnel. Aujourd’hui je souhaite devenir officier sapeur-pompier professionnel en province. La filière AES étant adaptée pour préparer des concours administratifs, elle me sera utile pour passer le concours d’officier Sapeurs Pompier Professionnel. Ce concours est le sésame pour intégrer l’Ecole Nationale Supérieur des Officiers Sapeurs-Pompiers, située à AIX EN PROVENCE.
Ceci reste mon objectif principal. Mon semestre 3 étant validé, j’ai décidé de combler mon temps libre par un stage au service Ressources Humaines de la Fnac de Saint-Lazare. J’y suis en qualité d’assistant, chargé des Ressources Humaines. Je voulais avoir une vision différente de ce que je voulais faire. Je vois à présent des perspectives de carrière qui peuvent m'intéresser à la suite de mon cursus sportif.
NICOLAS FORTUNÉ : Quelle serait selon vous le point fort de cette formation par rapport à votre projet professionnel ?
NICOLAS MOMPACH : C'est le lien au droit, le droit du travail, la polyvalence, la pluridisciplinarité, la faculté d’être capable de toucher à tout sans être excellent en tout mais suffisamment bon pour apporter une valeur ajoutée par mon esprit d’analyse.
Voilà ce que j’apprécie dans les Ressources Humaines, faire plusieurs métiers en un seul. Le seul Bémol c’est que là où je veux aller, le droit administratif me sera plus utile que le droit du travail. Mais quand on a touché au droit du travail on maîtrise mieux les mécanismes du raisonnement du Droit. Quel que soit le droit, on devient capable de rechercher des informations juridiques, de les analyser et de les appliquer.
Comment devient-on sportif de haut niveau ?
NICOLAS FORTUNÉ : Comment devient-on sportif de haut niveau ?
NICOLAS MOMPACH : Pour expliquer comment devenir sportif de haut niveau je vais prendre mon exemple. J’ai commencé en pratiquant le sport dans un club. Comme je l'ai dit, mes parents ne sont pas sportifs et personne ne pouvait vraiment m’aider dans mon club. Mon entraîneur était limité. Il est décédé le 10/12/2019. Ce n’est pas lui qui m'a apporté la technique pour réussir. Mais il a été le premier à croire en moi. Il a eu foi en moi. Il a eu la vision et le courage de me le dire. Mes parents quant à eux m’ont toujours soutenu et ce jusqu’à maintenant. J’ai rencontré par la suite Théophile LE LIEPVRE lors d’un stage. Il m’a détecté, et m’a proposé de m’entrainer sérieusement.
C’est un ancien sportif du CREPS des Haut de France à Wattignies. CREPS, pour Centre de Ressources, d'Expertise et de Performance Sportive. Il en existe 17, répartis sur l’ensemble du territoire français. Ils participent à la formation d'animateurs et d'agents publics, ainsi qu'à l'entrainement et à l'accompagnement de sportifs de haut niveau.
Théophile m’a proposé un entrainement personnalisé. Il n’entrainait que moi bien que n’étant pas officiellement entraineur à l’époque. Son objectif était de me pousser le plus loin possible. C’était un sportif de très bon niveau. Il a été mon mentor, une sorte de grand frère pendant deux ans. Nous n’étions pas dans une simple relation entraîneur entrainé, on pouvait discuter de tout. Il m’a pris sous son aile. Je me souviens lors du premier entrainement, il m’a demandé jusqu’où je souhaitais aller ? Quelle était ma plus grosse prétention ? Le sportif de haut niveau doit avoir de solides prétentions or je n’en avais pas assez à ce moment-là. Il faut avoir une estime de soi à la hauteur de celle du sportif de haut niveau. Il faut voir les choses en grand. Une haute estime de soi n’est pas forcément incompatible avec la modestie. Je pratique le sport de haut niveau pour aller jusqu’au bout de mes limites. La finalité n’est pas de dire que je suis meilleur qu’un autre. En t’entrainant 20 heures par semaine il y a des chances que tu sois meilleur que celui qui ne s’entraine pas avec autant d’intensité. On n’est pas sur ce niveau-là de la discussion. Il faut que nous ayons la prétention de se dire, que ce que font les autres, moi aussi je suis capable de le faire. Pour y parvenir, je vais m’entrainer. Je vais m’entrainer bien plus dur qu’eux. Je vais aller plus loin qu’eux. Je vais m’entrainer tout le temps, weekends et jours fériés y compris. C’est de cette prétention-là dont je veux parler.
NICOLAS FORTUNÉ : Pour y parvenir je suppose que vous travaillez aussi votre mental ?
NICOLAS MOMPACH : Enormément ! Mental, physique, alimentation tout y passe. J’apparente le tir à de la méditation. Dans le sens où l’esprit doit raisonner avec le corps. Tout le monde ne fonctionne pas comme moi. Certains sont plus ou moins dans le désir d’avoir un contrôle total de la situation, moi peut-être un peu trop. j’ai appris à fonctionner avec moi-même, avec mes besoins, mes capacités, mes forces, mes faiblesses. Il faut prendre conscience qu’en période de compétition il y a du stress. Tout le monde a peur, peur de ne pas faire ce que l’on est capable de faire, faire ce pourquoi on s’est entrainé avec autant de ténacité et de privations. Dans le stresse j’aime bien parler de sublimation non dans le sens freudien du terme, mais dans le sens de pouvoir transformer une émotion négative en quelque chose de positif. Mon stress, si je ne parviens pas à le maitriser, il va me tétaniser. Ce que j’aime dans le tir, c’est l’immobilité, la précision.
La précision c’est très subjectif. A quel moment on est précis ? Qu’entendons-nous par « être précis » ? Personnellement, la précision se transpose par un alignement de cercles, du dioptre jusqu’à à cible et c’est cette image que l’on recherche qui est très subjectif.
Quand on parle de tir de compétition, on est dans une sorte de contradiction. On est dans un contexte stressant. On a tous été stressé un jour. Le cœur bat plus vite, la tétanie tante de nous tenailler, la tachycardie saccade la respiration, les mains deviennent moites. En période de compétition ces manifestations physiques sont décuplées et nous devons bouger le moins possible.
Nos sens sont en éveil. Nos réflexes sont démultipliés. Il faut savoir inhiber le mauvais stress et le transformer en bon stress, c’est que je nomme la sublimation. Il faut que ce bon stresse se transforme en carburant de très haute qualité. Cela se fait par la méditation, le contrôle de soi, le contrôle de ses émotions.
NICOLAS FORTUNÉ : Qu’est-ce qui a été le plus compliquer à faire pour concilier études et sport de haut niveau ?
NICOLAS MOMPACH : Trouver un équilibre pour satisfaire l’excellence attendue dans mon apprentissage et celle attendue dans le monde de la compétition sportive. Il faut trouver le temps pour tout faire, tout en restant équilibré. Pour y parvenir je dois racheter le temps en sacrifiant certaines choses. Je ne sors pas. Je ne sors jamais. Je n’ai jamais fait une seule soirée étudiante même si j'en ai déjà eu l’envie. C’est agréable de sortir pour passer du temps avec des copains, mais je ne peux pas. Je ne peux pas me le permettre. Si je sors, et que je me couche tard, en sachant que le lendemain j'ai entraînement, je ne pourrais pas être performant.
NICOLAS FORTUNÉ : Vous vous entrainez toujours seul ?
NICOLAS MOMPACH : Non ! On a 4 entraineurs pour deux groupes de différents niveaux. Ma promotion est constituée de 15, 16 personnes. On s’entraine donc toujours en petit groupe et en fonction de nos disponibilités. Le tir sportif n’exigeant pas d’entrainement fixe on peut aussi s’entrainer tout seul. Evidemment, le fait de se confronter à ses rivaux reste un défi très stimulant. Il n’en demeure pas moins que ce sport est individuel.
NICOLAS FORTUNÉ : Avez-vous tous le même le profil universitaire, le même profile familial ?
NICOLAS MOMPACH : Non c'est assez diversifié. Beaucoup ont des parents chasseurs, tireurs ou anciens sportifs de haut niveau. Les profiles sont assez différents.
NICOLAS FORTUNÉ : Qu’en est-il du profile universitaire ?
NICOLAS MOMPACH : Il y a 3 personnes en Licence de biologie. Mon copain de chambrée est en école de commerce. J’en connais qui sont en 3ème année de licence STAPS. C’est très divers. Certains veulent devenir entraineur. D'autres souhaitent passer à autre chose, une fois la page du tir, tournée.
NICOLAS FORTUNÉ : Concrètement à quoi ressemble une semaine pour vous ?
NICOLAS MOMPACH : Les semaines changent énormément car on est obligé de construire nos emplois du temps en fonction du calendrier des compétitions. Les emplois du temps à l’université sont fixes, donc difficilement modifiables. A l’INSEP nous pouvons seulement modifier l‘intensité des entrainements et le lieu des entrainements. Une semaine se décompose souvent en demi-journée ou en journée complète. Le but est de perdre le moins de temps possible dans les transports.
NICOLAS FORTUNÉ : Est-il possible qu’une compétition arrive en même temps qu’un examen ?
NICOLAS MOMPACH : Oui bien sûr ! les compétitions se répartissent toute l’année et notre sélection est rarement connue longtemps à l’avance. J’ai déjà demandé des aménagements pour passer mes examens en décalé. A Strasbourg j’ai dû essuyer des refus. Il m’a donc fallu passer des examens à la session de rattrapage. Ici c’est différent, les sportifs de haut niveau sont écoutés, mieux encadrés et reconnus. Nous avons plus de flexibilité pour concilier les phases d’études et celles de compétitions. Je n’hésite pas à prévenir mes professeurs de la particularité de mon cursus universitaire et des contraintes s’y afférant. A chaque fois j’ai été écouté. Les équipes pédagogiques se montrent intéressées et curieuses. Pour la petite anecdote, en revenant de compétition un jour un professeur a arrêté son cours et a dit « Nous avons un champion de France parmi nous !» J’étais tout rouge. Je ne vais pas vous mentir, j’étais gêné. Le geste n’était pas nécessaire mais il l’a fait. Cela m’a fait plaisir
L’UFAPS est très proche de ses sportifs et se bat pour eux. Sans l’UFAPS nous n’aurions pas une si belle place à l’université. Nous n’aurions sans doute pas cette interview.
Pourtant le rythme est très soutenu. J’ai environ 20 heures d’entrainement par semaine et presque autant d’heures de cours. Mes semaines sont très chargées. Mais tout est une question de discipline. Je me couche et me lève très tôt. En stage en ce moment, je suis levé à 7 heures, je débute mon entrainement à 08h30 jusqu’à 12h00 puis j’enchaîne le stage de 13h30 à 18h30. Le mercredi de 18h30 à 19h00 j’ai une séance de préparation physique. Parfois même à 21h30 je vais jouer au foot avec des copains. Cela reste toutefois une préparation physique assez sympathique. Mes weekends sont consacrés au repos et aux révisions. Je vais courir ou faire un tour de vélo. Du lundi au vendredi mes activités physiques et universitaires représentent un volume d’environs 40 à 45 heures d’activité par semaine.
NICOLAS FORTUNÉ : Je vais vous poser une question très personnelle. Avec une activité aussi intense comment vivez-vous votre éloignement avec votre famille ?
NICOLAS MOMPACH : Je suis parti de chez moi à 15 ans. J’ai l'impression d’avoir loupé quelque chose quand je vois par exemple mes sœurs. Par ce que nous avons pris des chemins totalement opposés. Je vis dans un monde qu’elles ne peuvent pas comprendre avec exactitude. Elles savent simplement que c’est difficile.
NICOLAS FORTUNÉ : Vous le regrettez ?
NICOLAS MOMPACH : Non ! le rythme que je m’impose est certes difficile mais il m’offre des atouts non négligeables dans le monde du travail. Une discipline, une vision une certaine estime de soi qui nous aide à identifier clairement ce que nous sommes capable de faire et jusqu’où nous pouvons aller. C’est pour cela que j’encourage tout le monde à faire une activité sportive, une activité culturelle et de faire ce qu’ils aiment surtout.
NICOLAS FORTUNÉ : Est-ce là le conseil que vous donneriez à un jeune qui souhaiterait suivre vos pas ?
NICOLAS MOMPACH : Oui ! Faites ce que vous aimez, faites le bien et à fond parce que nous n’avons qu’une seule vie. Toute l’énergie que je déploie aujourd’hui, je sais qu’à 40 ans ce sera fini. Je le vois avec mes parents, ils ont 50 et bientôt 60 ans pour mon père. Ils sont sur un autre mode de vie. Je me dis que j’ai de la chance de pouvoir déployer toute cette énergie. Je le vois avec mes grands-parents. Mon grand-père a du mal à marcher, chose que nous faisons sans en prendre conscience. Il faut profiter de la vie et des instants présents, pour sortir, apprécier l’art, la musique, la peinture le sport, faire ce que l’on aime. On ne peut pas faire des études si on n’aime pas ce que l’on étudie. Si je n’aimais pas le tir je n’aurais jamais pu donner autant de ma personne pour satisfaire ma passion.
NICOLAS FORTUNÉ : Merci beaucoup Nicolas pour ce partage.